Histoire de Manses

La famille de Portes

La famille de Portes est originaire du Dauphiné. Elle s’est établie en Languedoc au début du XVIIème siècle et s’est ramifiée en deux branches, l’une catholique et l’autre réformée, dont l’ancêtre commun, le Noble Denis de Portes, est mort à Castres en 1621. La branche protestante, réfugiée en Suisse depuis la fin du XVIIeme siècle, s’est consacrée à la carrière militaire et a donné des officiers remarquables aux armées de Sardaigne, de France, d’Angleterre et de Hollande. La branche catholique s’est distinguée au Parlement de Toulouse et a conservé dans cette province une situation influente.
La terre de Manses et celle de Lapenne situées en Languedoc, diocèse de Mirepoix, étaient une très ancienne baronnie et l’une des six de ce diocèse qui ont toujours donné à leurs propriétaires le droit d’entrée à l’assiette du diocèse pour y représenter le corps de la noblesse. Cette baronnie a été possédée successivement par les maisons de Lévis, de Dicales, de Bourbon et Malauze. Ces terres ont appartenu ensuite au président de Portes.

  • Jean-François de Portes (1701-1759) a été président aux enquêtes du Parlement de Toulouse et premier marquis de Portes. C’est en sa faveur, que Louis XV a élevé en février 1747 la baronnie de Manses, diocèse de Mirepoix, au rang de marquisat sous le nom de marquisat de Portes. Le Roi a motivé cette grâce spéciale par les grands services rendus à lui et ses prédécesseurs, soit dans le métier des armes, soit dans les dignités judiciaires, par Jean-François de Portes et ses ancêtres. La baronnie qui appartient au président de Portes a été unie aux paroisses et consulats de Manses, Teilhet, Vals, Saint-Felix, Lapenne, Villautou, Cazalis, Ribouisse, Seignalens, Lignerolles, Corbières et Laure.
  • Adolphe-François-René de Portes (1790-1852) a prêté serment au gouvernement de Louis-Philippe le 23 juin 1830, ce qui lui a permis de devenir dans la même année député de l’arrondissement de Pamiers. Il a été élu représentant du canton de Mirepoix en 1836 et député en 1837. Il a été nommé pair de France par le Roi le 9 juillet 1845 et membre du conseil général de l’agriculture en 1857. Il a adhéré à l’Empire lors de l’arrivée de Napoléon III au pouvoir ; il a été fait sénateur d’Empire le 26 janvier 1852, réélu conseiller du canton de Mirepoix et président du conseil général en août 1852.
  • Henri-François-Maurice de Portes (1865-1929) a fait réaliser en 1894, en l’honneur de ses parents Paul-François-Thomas-Georges de Portes et Adèle Gordon-Hutton marquise de Portes, la verrière octogonale placée en l’église de Manses, représentant la vie de Saint-Jean-Baptiste jusqu’à sa décapitation. Le comte de Portes a eu beaucoup de démêlés avec la population de Manses jusqu’à ce qu’on lui interdise de passer à grande vitesse dans le village ; notre extravagant comte a alors fait créer un chemin contournant le village et arrivant au château : le chemin de la Révolte. Il a fait construire aussi de magnifiques écuries pour ses chevaux et fait déplacer le château sur la commune de Teilhet. Il a été maire de Lapenne en 1910. Après sa mort et n’ayant pas de descendance, c’est son neveu qui a hérité de ses biens.
  • Paul-Georges-Henry (1900-1969) a épousé en 1930 Hélène Rebuffel (1902-1940). Des revers de fortune et l’incapacité de gérer le domaine, l’ont conduit en 1938 à vendre le château de Roques (sur la commune de Teilhet) à la famille Vieljeux.

Le 28 juin 1940, l’ancien président du Conseil, Paul Raynaud, accompagné de sa compagne Hélène de Portes ont eu un accident : leur voiture a heurté un platane en entrant à la Peyrade (34), Hélène de Portes  est décédée. Ainsi mourait tragiquement la maîtresse de Paul Raynaud qui joua dit on un rôle déterminant dans la démission de celui-ci et l’arrivée au pouvoir de Pétain… Quand la petite histoire (de Manses) rencontre la grande (de France) 

Geneviève Mouton


Du prieuré de Manses au Marquis de Portes

Le prieuré de Manses possédait à Mirepoix une maison qui, vers 1221, devint le rendez-vous de plusieurs hérétiques albigeois en présence du prieur d’alors (Déposition de Pierre Guillaume d’Arvigna, le 18 octobre 1246)
« Les vexations et les pertes » qui en résultèrent, furent si grandes que l’abbé de Montolieu se vit obligé de réduire la communauté de Manses en prieuré simple, un religieux de l’abbaye mère gardant le titre de prieur, et un vicaire nommé d’abord par l’évêque de Toulouse puis celui de Mirepoix fut chargé du service de l’Eglise. Tous les biens furent affermés, et tous les ans jusqu’à la Révolution, un religieux de Montolieu venait recueillir à Manses les revenus des terres de la communauté.
En même temps que le prieuré bénédictin, il y avait à Manses une famille seigneuriale que les documents de l’époque nomment “d’Amansas” (latin Amancianis). En 1134, un membre de cette famille est devenu abbé de l’Abbaye de Montolieu.
Comme tous les seigneurs du pays, les seigneurs de Manses ont donnè dans l’hérésie albigeoise, aussi ont¬-ils été dépossédés par Simon de Montfort après la prise de Mirepoix , et leurs biens ont été attribués à Guy de Lévis.
Ces terres se sont transmises dans la famille de Lévis jusqu’en 1578, où faute de descendants, elles ont été vendues à la maison de Bourbon -Malauze et, par succession, au Comte de Poitiers qui les a aliénées en 1747 au profit du Président du Parlement de Toulouse, François Joseph de Portes, Seigneur de Pardailhan.
La même année, l’acquéreur les a fait ériger en marquisat sous le nom de Portes.  Et le village de Manses s’est ainsi appelé Portes jusqu’à la Révolution, puis de nouveau Manses jusqu’à la Restauration, de nouveau Portes jusqu’en 1897 où la mairie a enfin obtenu de pouvoir reprendre le nom initial de la commune.

Voici la liste des Seigneurs de Portes :

  • Joseph François de Portes 1701- 1759 1er  Marquis
  • Antoine François Auguste de Portes 1734-1790 2ème  Marquis
  • Jean Joseph François Thomas de Portes 1761- 1822 3ème Marquis
  • Adolphe François René de Portes 1790- 1852 4ème Marquis
  • François Thomas Paul Georges de Portes 1839- 1880 5ème Marquis (épouse Adèle Hutton)
  • Adolphe François René de Portes 1861- 1940 6ème Marquis
  • Henri François Maurice, dernier Comte de Portes né en 1865 et qui mourut à Manses en 1929

La Résistance à Manses

L’immensité de la forêt de la Bélène a permis d’abriter et de cacher, pendant la guerre, plusieurs maquis de résistants : les maquisards FTP de Manses dirigés par Fernand COSTES de Lapenne, des guerilleros espagnols, mais aussi des réfractaires au STO, des communistes, des juifs, des réfugiés espagnols…  qui pour beaucoup trouvaient une couverture en travaillant pour les sociétés forestières exploitantes de la forêt. Le maquis FTP prit le nom de « Groupe de triage des maquis de l’Ariège » ; sa fonction était d’héberger des maquisards de passage, de « trier » les candidats aux maquis et de constituer la réserve pour d’autres maquis du département. Ce maquis a pris de l’ampleur, les hommes travaillaient comme bucherons ou comme charbonniers grâce à la protection des contremaîtres ( Mr LABORDE et Mr Albert VIDAL, le maire de Manses, qui assuraient l’approvisionnement, les faux papiers d’identité, les fausses cartes d’alimentation…). L’intendance était aussi facilitée par le soutien de la population, des agriculteurs et de quelques commerçants de Mirepoix. Il faut citer la ferme du Four à Lapenne, chez Mme RIGAIL , qui a joué un grand rôle et servi de base pour des parachutages. A noter la venue du commandant BIGEARD, parachuté peu avant à Rieucros sur le terrain dénommé « Pamplemousse » qui venait réclamer sa part de parachutage…. Le groupe du maquis de Manses a participé aux combats de Rimont et de Castelnau-Durban ; Fernand COSTES a été nommé commandant de la place de Mirepoix à la Libération.
Le Maire de Manses, Albert VIDAL n’a pas connu la Libération, arrêté par la GESTAPO il a été fusillé au pont de Font-Communal, le 27 Avril 1944, le jour de son cinquantième anniversaire…  Il est enterré dans le cimetière de Manses. La commune a donné son nom à la salle des fêtes sur la place du 14 juillet, face au monument aux morts.


Vestiges archéologiques à Manses

L’Ariège est une terre qui recèle beaucoup de traces et de vestiges de la préhistoire, la commune de Manses y a contribué. On y a fait des découvertes datant de l’époque néolithiques (meule à bras à l’emplacement du cimetière, haches polies dispersées dans les collines) et de la fin de l’âge du fer (tessons d’amphores) au débouché du ruisseau des Bessous dans la plaine de l’Hers.
De l’époque mérovingienne, une sépulture isolée a été mise au jour fortuitement, dans les années 1900, au dessus de la ferme de Vergnes face au village. Une lourde plaque d’agrafe wisigothique fut recueillie dans la tombe. Le métal de bronze est orné de bossettes et de fines gravures en entrelacs. L’objet figure au musée Saint Raymond à Toulouse, à côté d’autres ornements de la même époque recueillis au cimetière mérovingien de Tabariane (Teilhet) . Cf gravure.
A la même époque, le comte de Portes fit opérer des fouilles dans la motte féodale de la forêt de la Bélène. Une large tranchée en témoigne encore aujourd’hui. Mais aucune découverte n’a été relatée, aucun écrit n’ayant rendu compte de ces fouilles rudimentaires. La forêt de la Bélène  recèle des vestiges de l’industrie des maîtres verriers, depuis le Moyen Age jusqu’au début de l’époque moderne, aux lieux dits La Verrière Vieille, Mestre Pey, Mestre Bertrand, Mestre Amiel…
Plus récemment, en février 1998, la réquisition préfectorale pour la réalisation du centre d’enfouissement des ordures ménagères de Berbiac a déclenché des fouilles archéologiques préventives importantes «dans une procédure d’urgence absolue ». Furent mises au jour :

  • quelques structures néolithiques : un « foyer de type  polynésien » (structure de combustion à galets chauffés de 2,30 m sur 2,60 m), des structures à galets, des fosses et trous de poteaux.  Ces aménagements néolithiques de petites dimensions étaient en mauvais état de conservation et ne justifiaient pas de fouilles exhaustives ;
  • un four verrier d’époque médiévale ou post médiévale qui a fait l’objet de fouilles approfondies. Ce four était isolé, et semblerait être un atelier temporaire implanté à cet endroit pour utiliser au maximum les matières premières : bois et silice sous la forme d’un banc de grès à proximité.

L’ensemble de ces découvertes ont fait l’objet d’une publication du Service Régional de l’Archéologie d’où sont tirées ces notes. Cette publication est encore disponible en mairie.


Le blason du marquis de Portes

Il en subsisterait huit dans la région.
Quatre se trouvent dans l’église de Manses. L’un est situé dans l’un des douze panneaux périphériques de la verrière en rosace illustrant la vie de Saint Jean-Baptiste, saint patron de la paroisse, et il fait partie intégrante du Mémoriam du cinquième Marquis de Portes et de son épouse Adèle Gaston Hutton. Il est accolé à d’autres armoiries qui ne sont pas identifiées mais qui pourraient être les armoiries de son épouse.
Un deuxième blason est sculpté sur bois et constitue le motif central de l’ornementation du banc seigneurial. L’écu y est présenté entre deux lions debout et constitue un ensemble sculptural remarquable. Deux autres figurent en partie basse des deux vitraux du transept, leurs « cantons de pointe » sont en partie cachés par l’encadrement du mur.
Deux autres figurent en l’église de Vals sur chacun des vitraux de la nef supérieure, représentant respectivement Saint Georges et Saint Loup, où ils évoquent l’origine des dons faits par la marquise de Portes lors de la restauration de l’église en 1887.
Le septième blason se trouve au château de Roques à Teilhet dans l’orangeraie ; il est représenté dans un moulage où un lion assis tient d’une patte avant l’écu qui est ovoïdal et qui pourrait être de ce fait le plus ancien, vraisemblablement antérieur à 1780.
Le huitième est situé dans la partie ornementale de l’un des portails du château de Roques côté ouest ; il est encadré par deux lions debout qui se font face ; l’ensemble étant moulé dans la fonte.
La couronne du marquis y est associée sur sept d’entre eux, seul le plus ancien n’en a pas. Par ailleurs, il y a similitude entre les armoiries du banc seigneurial et celui du portail pour la présence de deux lions.
En ce qui concerne le banc, c’est le 18 février 1862 qu’un arrêté préfectoral autorise la concession d’un banc dans l’église de Portes en faveur du marquis ; on peut donc logiquement en déduire qu’il date de cette époque.
Le portail de l’accès ouest était à l’origine à l’entrée du château de Portes (à Manses), incorporé au mur d’enceinte et attenant à l’église. Pour permettre l’élargissement du chemin riverain, ce mur d’enceinte fut en partie supprimé au cours des années 1970, le portail n’ayant plus de raison d’être fut déposé, restauré, et remonté au château de Roques en 1995.
Quand au blason, pour les héraldiques, il est « d’azur à la fasce d’argent accompagné en chef de trois merlettes rangées et en pointe d’une tour maçonnée le tout en argent. On pourrait ajouter que la tour est également crénelée et ouverte ».

  • AZUR : Couleur bleue représentée par des traits horizontaux rapprochés.
  • ARGENT : se figure tout uni et tout blanc